Je quitte mon caillou aux heures fraîches. Les cueilleurs de lavande attaquent aussi leur journée. Brèves salutations. Je rejoins le fond de vallée de bonne heure et de bonne humeur. Petit déjeuner le long de la route Ouirgane / Tizi n Test, un col bien célèbre au Maroc. Scénario bien connu, je dois maintenant remonter une grande vallée jusqu'au pied de la montagne, 20km plus loin, 1km plus haut... J'avais repéré la veille un sentier qui pourrait m'éviter les lacets de la piste. Je décide à l'unanimité d'essayer de le rejoindre espérant quelque économie de mouvement. Cette vallée est gigantesque et je suis ridiculement petit.

Je m'engage et commence à suivre l'oued. Très vite, je dois enjamber une clôture. A peine plus tard, je met le pied dans l'eau. Et je suis maintenant bloqué par une chute d'eau infranchissable.

Je me décide à rejoindre le promis sentier. Quinze mètres au dessus de moi. Je refuse de faire demi-tour. Je sors les gants en cuir de mon sac et commence la grimpette.

Roche millefeuille très friable, buissons piquants, le contraire d'une partie de plaisir. Quand je jette un coup d'oeil sur ma faible progression, je prends conscience de l'impossibilité de rebrousser chemin, de l'interdiction formelle de chuter. Je parviens à atteindre ce que je croyais être un sentier au bout d'un litre de sueur... il s'agit en fait d'un canal d'irrigation, à flanc de montagne. Des murets de 10cm de large. 30 cm d'eau courante entre les deux. Je n'ai pas d'autre choix que celui de remonter ce canal, en espérant qu'il rejoigne la piste plutôt qu'une cascade... Une fois de plus, un calvaire. Mais le parcours m'interdit de songer à autre chose que mes appuis. A ma droite un vide vertigineux. A ma gauche, une haie de trucs épineux. Fidèle à mes convictions et peu motivé par des envies suicidaires, je choisis l'agression cutanée. Une heure à marcher comme un canard au dessus du vide. Le canal prend fin, et ne rejoint pas la piste. Les emmerdes volent souvent en escadrille. Il faut que je rejoigne cette putain de piste, pas très loin, à 300m d'ici. Mais 200m de dénivelé positif, ce qui promet une deuxième session bien verticale... A quatre pattes, je suis en sécurité, allons-y!! La piste est enfin là, il est 14h, 5km en 4 heures, je vide deux litres pour fêter çà. Je peux maintenant avaler les kilomètres jusqu'au dernier village accroché à la montagne, Tizgi. J'y arrive vers 18h, la pluie menace, juste continuité de cette difficile journée. Mais le vent tourne quand je croise deux gamins qui me demandent si je vais au gîte... Un gîte ici? Alors bien sûr que je vais au gîte !!! J' y rencontre Karim, guide de montagne à Imlil, ses 5 potes muletiers et une famille de Français. Je pose mon sac dans l'entrée, il se met à pleuvoir. Si j'avais eu un pote, je lui aurais fait un clin d'oeil... Qu'il est bon de converser en français. Karim connaît parfaitement la montagne. Demain il raccompagne les clients à Marrakech. Les muletiers rentrent à vide direction... Imlil comme moi !!! On me propose de partager la ballade en leur compagnie, un mulet s'occupera de mon sac !!! Départ de nuit à 6h. Nous commençons la cohésion du groupe à l'épicerie du village qui retransmet la Ligue des Champions, le match aller Bayern / Real. Depuis 2012, rien à changé, on est soit Reali soit Barsawi. Ici, tout le monde est catalan mais il est de bon ton de venir encourager l'adversaire de l'ennemi...

2017-04-12-1.jpeg

2017-04-12-2.jpeg

2017-04-12-3.jpeg

2017-04-12-4.jpeg