Pas de gel nocturne, pas un nuage côté ouest. C'est un bon jour pour partir. A l'étage supérieur, le Yagour, un plateau verdoyant. Une ressource estivale pour les bergers quand le feu du soleil a condamné tout espoir de paître dans la vallée. Pas une bête avant le 15 juillet, c'est la règle stricte de l'Agdal. Les azibs, bergeries de montagne, sont donc vides de leurs propriétaires. Je m'offre un pique nique auto-bronzant au milieu d'un lotissement, soleil de plomb et neige de la veille. La digestion m'emmène dans une puissante rêverie entre préhistoire et pastoralité. En reprenant la ballade, je ne quitte pas la transe. Le revêtement est idéal. La spongiosité du sol apporte à l'herbe rase son moelleux, chaque pas est un délice. Un régal pour l'oeil également qui peut se libérer de la surveillance des appuis.

Deux silhouettes au loin. Je plisse les yeux comme pour vérifier une information que le cerveau aurait du mal à décoder. Deux cyclistes. Deux allumés au vu du choix de leur terrain de jeu. Nous nous rejoignons. Présentations d'usage. Ils sont Suisses. Presque les 3 Suisses, c'est passé fin. Ils prendront pour descendre mon chemin de ce matin. Ce qui leur garantit une descente des gorges avec un vélo sur le dos et c'est ce que je leur annonce pour la suite. Ils ne comptent pas faire demi-tour et c'est avec une grande sagesse qu'ils abordent ce moment qui sera long et fastidieux.

Pas de programme aussi sportif pour ma pomme. Aucune envie de redescendre dans la vallée par cette belle fin d'après-midi. Marcher encore un peu avant le bivouac. Jusqu'au dernier groupe d'azibs. Je me garde les gravures rupestres pour demain matin. L'ouverture de la tente face au soleil couchant, je profiterai des lieux jusqu'au dernier rayon. Après la dernière caresse, la première morsure, celle du froid. La cloche a sonné, ça signifie d'aller dans son duvet. Depuis deux jours en compagnie nocturne d'une angine. Le silence requiert la paix intérieure. De l'autre côté du ruisseau qui me sépare des bergeries, un chat miaule, je ne suis pas seul. Le temps pour lui de traverser, pour moi de m'assoupir et voilà que je l'entends laper un fond d'eau fraîchement filtrée. Un dans la gorge, un devant la tente. Nuit féline.

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