Comme à l’accoutumée, le camping baille encore aux corneilles tandis que j’amorce le départ de ma longue étape du jour. Den Helder, c’est la fin de la Hollande du Nord, après, c’est la Frise, la région septentrionale des Pays Bas.

La physionomie du parcours est on ne peut plus simple. Vingt kilomètres en ligne droite entre la route et la dune puis dix au cœur d’une jolie forêt sableuse, et enfin les cinq derniers en bord de mer jusqu’au centre-ville. Je mets les gaz sur le premier tronçon, sans grand intérêt. J’arrive aux abords de la pinède en un peu plus de trois heures de marche sportive. Je profite ensuite plus lentement de la fraîcheur relative à l’ombre des pins maritimes, sans toutefois lambiner. Mes paupières crépitent, je pourrais facilement taper une sieste mais je résiste à l’endormissement et continue mon chemin. La voûte végétale protectrice se disloque peu à peu pour laisser place à une digue bétonnée annonçant l’environnement urbain à venir. Les derniers hectomètres sont ponctués d’une pluie fine et presque sèche. La vue dégagée sur la mer invite à la pause contemplative ( Je crois la n°524…) et je ne me fais pas prier. Le saupoudrage des bancs publics a été finement calculé, je ne peine pas à trouver une place de choix. Je savoure.

Mais derrière la digue se trouve le côté sombre. La ville est déserte, on peut comprendre vue sa laideur mais quand même. Elle est sale, ce qui est rare dans ce pays. Les hominidés que je croise sont bien abîmés, fait également notable. Mais toujours moins abîmé que l’hôtel que je me suis réservé. J’avais le choix entre le quartier du port que je traverserai demain et celui de la gare, collé au centre ville. J’ai choisi l’ambiance ferroviaire et la proximité des commerces. L’hôtel est à démolir, la cage à lapin est à 120€ la nuit, les concurrents, plus chers, sont complets. Le réceptionniste ne coopère pas, essaie de me refiler la plus miteuse de ses cellules. Mais je mènerai le combat, me sachant prisonnier de ce taudis. Je lui ferai ouvrir un local sûr pour ma carrossa, il me fournira un ventilo pour éviter une mort par suffocation et je choisirai la moins pire des chambres insalubres. Le seul projet de rénovation sérieux, un pain de plastique, façon boulangerie corse. Mon imagination devenue fertile me fera boycotter le restaurant. Quand on pulvérise sa CB, autant épargner son tube digestif. Je finis malgré tout et paradoxalement chez le clown à cheveux rouges devant le rodéo/scooter des livreurs de chez Domino. Le 15 août n’est ici pourtant pas férié mais en a la glauquitude. Je fais quelques courses à la tombée de la nuit, avant la fermeture. Ne restent que les zonards. J’y ai finalement ma place. Point positif, sûrement lié aux points négatifs, les magasins de café sont bien achalandés.

Dans mon cagibi surchauffé, les bras de Shiva m’accueillent pour la nuit.

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