Mercredi. Malheureusement impossible de compter sur une erreur des prévisions hygrométriques. La danse de la pluie va commencer sans tarder. Le ciel est vraiment chargé, inutile de croire à une brève averse. Je me hâte de mettre mes effets à l’abri et me félicite de ne pas faire de grasse matinée. J’en ai presque terminé quand le mur d’eau s’abat sur le camping. Mon étanchéité ne tient qu’à une bande de 50cm de large le long du hangar agricole. J’y dispose mes affaires en rang d’oignons sur vingt mètres. La proprio me salue aimablement, les seaux qui tombent du ciel semblent l’avoir rendue plus loquace. L’éclaircie est prévue pour la fin de matinée, ce qui laisse le temps à mes branchies de se développer. Le temps de boire quelques cafés, le temps de reprendre ma réunion avortée de la veille. J’achète en ligne un aller pour Vlieland. Tout est complet jusqu’à vendredi, dans deux jours, j’attendrai. Je prends aussi le ticket pour Terschelling, l’île suivante. Aucun hôtel à De Cocksdorp, l’embarcadère pour Vlieland, je me résigne à rester à De Koog, mais logé dans le confort d’un quatre étoiles. Pour attraper mon bateau, je n’aurais d’autre solution que celle d’appeler un taxi, je ne suis pas monté dans une voiture depuis le 20 juin…Et c’est cette entorse à mon règlement qui mettra fin à ma progression vers le Nord pour l’été 2022. Je choisis Harlingen, sur la côte, pour marquer mon point d’arrivée et donc mon futur point de départ. Les jours qui me restent seront des jours de vacances. Je migre vers mon nid douillet dès que possible, quoi de plus sage que de commencer ses congés par savourer la pluie plutôt que de l’affronter?

Jeudi. Mes premières heures d’oisiveté m’anéantissent plus qu’elles me régénèrent comme si ce qui faisait ma force s’était envolé. Et puis De Koog n’est pas non plus le Jardin d’Eden. J’y passe ces deux jours entre chambre et plage, entre fierté et mélancolie, délaissant les trop nombreuses et inutiles attractions de la petite station balnéaire. Je comptabilise sans panache les kilomètres parcourus jusque-là, 1150. De quoi être content, mais en bon Français, je sais trouver la recette pour que rien ne soit bien.

La solution est peut-être de changer d’air, de changer d’île. C’est le programme de demain. Un programme bien ficelé mais plein d’inconnus. Ma charrette et sa largeur pourraient être un problème. Je n’ai pas pu décrypter les conditions d’accès à bord, les bagages autorisés. On verra. Un premier bateau partira pour Vlieland à 9h30. Un second en repartira pour Terschelling un peu moins de dix heures plus tard. Mon premier rendez-vous, un taxi à 8h15, le petit déjeuner commence à 8h…

Le soleil ne dicte plus mes journées. Je ne suis plus un pèlerin.